Le jeu vidéo est-il un art ? Cette question, maintes et maintes fois posée trouvera diverses réponses. Et parce que ces réponses sont plurielles, elle continuera à être posée. Surtout lorsqu’un jeu comme JETT : The Far Shore passe entre vos mains. Parce que la dernière productions de Superbrothers et Pine-Scented pose énormément d’autres questions ; le jeu vidéo est-il gameplay, narration ou émotions ? Faut-il vivre une expérience de plusieurs jours ou un morceau de vie ? Ce continent lointain mérite-t-il d’être exploré ?
Une planète quelque part dans l’univers. Un village. Une tribu. Dès les premières minutes on se plonge dans une ambiance mystique à la fois envoûtante et inquiétante. Il se passe quelque chose de grave. Cette planète va disparaître. Il est urgent de la quitter et d’en trouver une nouvelle pour que cette civilisation puisse survivre.
Loin de se résumer à un paragraphe rapidement écrit sur le coin d’une table, l’introduction de JETT The Far Shore vous plonge immédiatement dans un monde étrange, mais familier. Le design cartoon des personnages, les lignes épurées lui donnent un caractère naïf, le langage utilisé lors des échanges semble tout à fait cohérent et fait penser à un dialecte indien. Finalement mélange d’Inuit et d’Arabe il permet au joueur de percevoir le sens du dialogue sans le comprendre. Bien sûr, les sous-titres lèvent le voile sur ce mystère, mais vous voici immédiatement pris dans l’expérience. Ces dialogues sont forts car magnifiés par l’importance de leurs contre points : les silences.
Space Opera
Ces derniers sont nombreux et laissent au joueur apprécier l’importance d’une musique et d’une bande sonore tout simplement grandioses. Les arrangements réalisés par SNCTFC et l’interprétation des différents morceaux de musique donnent tout simplement le frisson à de nombreuses reprises. Vous avez vu 2001 L’Odyssée de l’Espace ? JETT vous emmène dans une fresque sonore identique.
Difficile de vous raconter ce qui se passe dans JETT. La narration ne va pas vous emmener dans un scénario épique fait de revirements de situations incessants. JETT, c’est un voyage qu’on vous propose. Effectivement sur un rivage lointain avec les premiers explorateurs.
Dans une bulle
Découpé en cinq chapitres JETT a la particularité de vous donner une estimation du temps passé dans chacun d’entre eux. Et pour cause. S’il y a bien des points de sauvegarde réguliers, vous n’avez absolument pas la main sur le moment où vous souhaitez enregistrer votre aventure pour la reprendre un peu plus tard. Ici, ce sont des expériences successives et continues qu’il faut vivre. Du chapitre 0. Embarquement (30 minutes) au IV Persévérance (3 heures).
A chaque fois, vous entrez dans une expérience qui mêle le space opera et le mystique. Vous n’avez pas envie d’être interrompu par les devoirs du petit ou les tâches ménagères qui vous incombent. C’est votre bulle et votre histoire qui se narre au travers du personnage que vous incarnez. Principalement dans votre vaisseau d’exploration, mais aussi à pied, à vous de découvrir un nouveau monde étrange ou le mysticisme se mélange à la science.
Même s’il y a beaucoup de phases de discussions et de narration, la majeure partie du temps se déroulera en exploration à bord de votre appareil. Ce dernier sera votre moyen de locomotion et votre outil. Un outil singulier de par son design et ses capacités. Il est un des rares vaisseaux « spatiaux » (il ne fonctionne qu’en atmosphère) à ne pas avoir de lasers ou de missiles.
Le gameplay au second plan
La première impression ressentie à bord du vaisseau d’exploration, c’est la vitesse. Passées les toutes premières minutes de découverte, il file comme le vent au raz de l’eau, profitant de votre gestion avisée des moteurs. Il peut également s’élever plus haut dans les airs grâce à une impulsion et atteindre ainsi des terrains plus élevés. La gestion de sa physique et de son inertie vous feront parfois pester. Des actions simples comme se poser sont parfois problématiques. On ne peut pas dire que JETT soit un modèle d’ergonomie.
Cela suffit cependant à proposer à l’utilisateur de petits challenges et énigmes sympathiques. Certains n’y verront que de ridicules énigmes, d’autres (comme moi) passeront plusieurs dizaine de minutes à chercher une solution. En réalité, peu importe. Car ce qui est évidement dans JETT, c’est que c’est moins la destination que le voyage qui compte. D’ailleurs une fois votre aventure terminée, au bout d’une quinzaine d’heures vous reviendrez avec plaisir à l’exploration pour aller révéler les derniers éléments de carte restés cachés sous des points d’interrogation.
Techniquement moyen, voire daté, le jeu n’en est pas moins visuellement impressionnant grâce à une belle mise en scène et ç un design général particulièrement réussi dans le domaine de l’étrange et du dépaysant. Ne serait-ce que cette vue de la station spatiale qui vous emmène en orbite autour de la planète qui incarne tous les espoirs de la civilisation que vous essayez de préserver.
Lorsque l’aventure se termine et que vous posez la manette, il est évident que JETT The Far Shore n’est que le premier épisode de ce qui pourrait devenir une série. Une série dont cous aurez certainement envie de jouer le second épisode.